Messes du Prélat et du Vicaire auxiliaire à Rome

Voici l’homélie que le Prélat de l’Opus Dei a prononcée à l’occasion de la Saint Josémaria, à Rome, en la basilique Saint-Eugène, ainsi que des extraits de l’homélie de Mgr Fernando Ocariz, Vicaire auxiliaire, en cette solennité.

Loué soit Jésus-Christ !

Chers frères et sœurs,

Le dialogue entre Jésus et Pierre relaté dans l’Évangile ne peut que nous émerveiller et nous combler de reconnaissance. Après s’être servi de sa pauvre barque, le Seigneur accompagne Simon et l’invite à aller au large pour aller pêcher. Il sait bien que c’est un pêcheur chevronné qui lui avoue, en toute simplicité et confiance, qu’il n’a rien pris de toute la nuit.

Pierre se demande comment il pourrait en être autrement maintenant qu’il fait jour. Cela dit, il fait confiance à celui qui le lui conseille, il exécute ce que Jésus lui demande et jette ses filets. Devant l’extraordinaire fécondité de cette pêche, Pierre tombe à genoux. Le Christ lui accorde alors quelque chose de plus grand : il lui annonce que, dès cet instant, lui et ses compagnons seront des pêcheurs d’hommes.

En cette Année Jubilaire de la Miséricorde, ce geste du Seigneur permet de percevoir une preuve supplémentaire de la miséricorde divine.

Jésus s’apitoie sur le sort de ces pêcheurs qui n’ont rien tiré du travail dont ils vivent. Mais il respecte leur liberté et au lieu de faire un miracle pour les épater, sans qu’ils n’y soient pour rien, il leur suggère de jeter encore une fois leurs filets.

la miséricorde de Dieu que le Christ a apportée sur la Terre, donne des ailes à la liberté humaine

Aussi, ce sont eux, les apôtres eux-mêmes, qui prennent «une grande quantité de poissons», si grande que « leurs filets s’en sont presque déchirés ». C’est logique ! C’est bien parce que le Seigneur a eu pitié d’eux que sa compréhension a éveillé chez eux une foi si grande qu’elle en est palpable : le Maître n’ignore pas leur capacité de travail, d’investissement, de croissance, lorsqu’ils peinent ensemble à la tâche.

Aussi, sommes-nous en mesure d’assurer que la miséricorde de Dieu que le Christ a apportée sur la Terre, donne des ailes à la liberté humaine.

C’est merveilleux! Dieu nous laisse faire, il tient à ce que nous apportions notre contribution. Il compte sur la compétence professionnelle de chacun, des pêcheurs, des maîtres, des maçons, des artisans, des fonctionnaires, et de tant d’autres. Chacun de nous — médecins, personnel sanitaire, journalistes, jeunes et vieux — peut déceler ici la leçon que saint Josémaria nous propose lorsqu’il parle ainsi de l’invitation du Seigneur : « Au large ! Repousse le pessimisme qui te rend lâche » (Chemin, n. 792). Nous avons tout intérêt, tous et chacun de nous, non seulement à recevoir mais à donner, qui plus est, à nous donner, à nous livrer pour arriver à être dignes d’écouter l’appel du Seigneur : «Ne crains pas, désormais ce sont des hommes que tu prendras».

Dieu nous laisse faire, il tient à ce que nous apportions notre contribution. Il compte sur la compétence professionnelle de chacun

C’est en livrant notre vie pour faire connaître et aimer Jésus, —de par le fait d’être pêcheur d’hommes—, que nous trouvons notre véritable dignité. « L’homme ne saurait trouver sa propre plénitude si ce n’est dans le don sincère de lui-même aux autres », nous dit le concile Vatican II (Gaudium et Spes, 24).

Mais reprenons l’Évangile. Nous avons contemplé comment le Seigneur a élevé Pierre vers une vérité plus noble : de l’efficacité matérielle de la pêche à la fécondité de l’apostolat.

« Écarte-toi de moi, s’écrie Pierre, encore sur sa barque, car je suis pécheur ». Tout comme Pierre, nous reconnaissons nous aussi que nous sommes pécheurs. Et en même temps, comme Jésus, nous aussi nous rencontrons en cette vie des personnes qui ont été inexplicablement éloignées, marginalisées, rejetées et que la souffrance a conduites au repli sur leur propre misère et leur solitude.

Saint Josémaria comprit cela dès sa jeunesse et rendait visite aux malades, abandonnés de tous, dans les hôpitaux ou chez eux, en se déplaçant fréquemment à la périphérie de Madrid, mû par sa sensibilité de pasteur.

Dans la lettre qu’il écrivit à l’occasion de la béatification de mon prédécesseur, le pape François fit allusion à la prédisposition qu’il découvrait aussi chez le bienheureux Alvaro pour aller à la rencontre de tous, lui qui « allait dans les quartiers extrêmes pour aider tant de personnes en leur formation humaine et chrétienne » (Lettre du 26 juin 2014)).

Tout au long de sa vie, dit Jean-Paul II, saint Josémaria “un saint d’une grande humanité (…) a encouragé de nombreuses œuvres d’évangélisation et de promotion humaine au profit des plus pauvres”. (Discours, 7-X-2002).

Comme le Christ surprit Pierre, nous aussi sommes en mesure de provoquer chez les autres la même surprise que nous éprouvons face à la compréhension, l’encouragement, l’aide spirituelle ou matérielle.

Aujourd’hui, en suivant aussi l’exemple personnel du Pape et en accueillant avec joie son invitation à “annoncer la miséricorde de Dieu” (Misericordiae vultus, 11-IV-2015), j’aimerais encourager tous les fidèles et amis de la Prélature à toujours suivre, - comme ils le font déjà, Dieu merci -, ce chemin ouvert par le Christ et tant aimé des saints : à servir les autres, à les aider en leurs nécessités, à sortir d’eux-mêmes, à avancer « au large » comme le Christ, et à l’accompagner là où tant d’autres nous attendent, à leur insu peut-être.

Le Seigneur nous donne la terre en héritage afin que nous fassions à tous la surprise de l’amour et de la joie des enfants de Dieu.

Comme le Christ surprit Pierre, nous aussi sommes en mesure de provoquer chez les autres la même surprise que nous éprouvons face à la compréhension, l’encouragement, l’aide spirituelle ou matérielle. Comme Pierre, nous pouvons nous appuyer sur notre profession de foi quotidienne ou sur notre travail pour répandre la miséricorde de Dieu : l’enseignant y arrivera en instruisant l’ignorant ; le médecin, en soignant délicatement ses malades ; le juge, sérieusement dévoué à sa tâche; le cuisinier, en préparant à manger à celui qui a faim, etc. Vous aussi, pères et mères de famille, en votre merveilleuse «profession de parents», vous montrez votre miséricorde à tout instant, tous les jours, du matin au soir, sans relâche, en vous aidant mutuellement et en éduquant vos enfants dans la joie de l’amour.«Les œuvres de miséricorde sont infinies, a dit le pape François, chacune avec son sceau personnel, reflète l’histoire de chaque visage» (Méditation, 2 juin 2016).

Finalement, nous pouvons dire, avec saint Josémaria, que l’existence du chrétien se déroule dans le climat de la miséricorde de Dieu. « C’est dans ce cadre que se situent ses efforts pour se comporter en fils du Père » (Quand le Christ passe, 8). Je te donnerai […] les confins de la terre en héritage, dit le psaume 2. En effet, le Seigneur nous donne la terre en héritage afin que nous fassions à tous la surprise de l’amour et de la joie des enfants de Dieu.

Que la Sainte Vierge, Mère de Miséricorde, nous accorde un cœur miséricordieux pour aimer les autres comme des enfants de Dieu et pour ainsi aimer la joie de nous mettre à leur service.

Que Jésus-Christ soit loué!

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Mgr Ocáriz: "Dieu et les autres: à l’horizon de notre vie”

(Extraits de l’homélie prononcée à Rome, le 26 juin 2016, en la paroisse Saint Josémaria)

Nous faisons tous partie d’une grande aventure apostolique. L’Évangile que nous venons de lire nous montre Jésus invitant de nombreuses personnes à s’investir comme Lui pour montrer le chemin vers le vrai bonheur. Il y a tellement de monde autour de lui, que Jésus demande à Simon la permission de monter dans sa barque. À la fin de sa prédication, le Seigneur lance un défi au pêcheur : " Avance au large et jetez les filets pour la pêche "; avance au large, duc in altum! Ces paroles, d’une grande résonnance dans le cœur de saint Josémaria, sont devenues un écho, entendu toute sa vie durant. Duc in altum !

Avance au large et jetez les filets pour la pêche

De son côté, saint Josémaria reprit très souvent cette injonction du Seigneur auprès de nombreux chrétiens, afin qu’ils ne se contentent pas d’une amitié superficielle avec Dieu, pour qu’ils ne tombent pas dans la tentation de se replier sur eux-mêmes.

"Naviguez vers le large, et jetez vos filets pour pêcher. Ce zèle apostolique que le Christ a mis dans notre cœur ne doit pas s’épuiser, s’éteindre, sous l’effet d’une fausse humilité. (…). Il nous ordonne de lutter, de reconnaître nos défauts ; non pour nous en effrayer, mais pour nous repentir et susciter en nous le désir d’être meilleurs. » (Quand le Christ passe, 159).

Dieu et les autres : tels sont les grands horizons de notre vie. Aller à la rencontre de Dieu qui est notre Père, et des autres, nos frères (…). Le Seigneur nous appelle à aller au large, en cette mer d’amour infini qu’Il est lui-même, à nous laisser guider par le Saint Esprit, pour être en mesure d’avoir une conversation d’enfants avec leur Père, comme nous le dit saint Paul.

Plongeons-nous donc dans cet océan de paix et d’amour qu’est Dieu, en notre oraison quotidienne, dans ces espaces de silence et de prière intime que nous sommes en mesure de nous réserver, si nous nous efforçons un tant soit peu, au cœur des occupations de notre journée.

Nous découvrirons que le Seigneur est toujours à nos côtés, même quand il nous semble que la journée s’achève avec des filets vides, comme ce fut le cas de Pierre, le jour où il retrouva le Maître près du lac de Génésareth.